Nous faisons régulièrement face à des questions sur les sujets de cycle menstruel, grossesse et fertilité. Pour en savoir plus, nous sommes allés à la rencontre de Claire Gauché-Cazalis, médecin gynécologue à Levallois.
Bonjour Claire, pouvez-vous vous présenter ?
Bonjour, je suis Claire Gauché-Cazalis, gynécologue obstétricienne, spécialisée en aide médicale à la procréation, c’est-à-dire que j’aide les couples à avoir un bébé quand ils rencontrent des difficultés.
Vous exercez en cabinet. Quel a été votre parcours ?
J’exerce en cabinet de ville à Levallois, depuis 2019.
Je travaille pour la partie technique à la clinique Pierre Cherest, à Neuilly. J’effectue là-bas les interventions auprès de mes patientes pour la PMA (Procréation Médicalement Assistée) et la chirurgie de l’infertilité.
Auparavant, j’ai suivi une formation médicale générale pendant 7 ans, puis une spécialisation en gynécologie obstétrique de 4 années.
Enfin, j’ai une spécialité supplémentaire de médecine de la reproduction.
J’ai effectué mon parcours à Paris, d’abord interne, puis chef de clinique dans le service de gynécologie de l’APHP de Port Royal et de Bichat. J’ai ensuite poursuivi mon travail en tant que praticien hospitalier à Bichat durant plusieurs années. J’ai donc quitté l’hôpital en 2019 pour ouvrir mon cabinet.
Comment détecter les jours de fertilité ?
Les jours de fertilité sont les jours d’ovulation. On ne les connaît malheureusement qu’a posteriori au moment de ses règles, car ils étaient 14 jours avant.
Afin de connaître ses jours de fertilité sur son cycle à venir, si les cycles sont réguliers, c’est alors facile. On retire 14 jours de la date d’arrivée des règles. Cela nous indique la période d’ovulation.
Dans le cas où les cycles menstruels sont plus irréguliers, il est alors plus difficile de déterminer la date d’ovulation. On peut alors utiliser des tests d’ovulation, disponibles en pharmacie. Ils sont fiables.
Si ce test d’ovulation reste négatif, cela nous oriente vers un trouble de l’ovulation.
Par ailleurs, il existe des méthodes naturelles telles que les courbes de température ou l’évaluation de la glaire cervicale. Ces méthodes me semblent moins faciles en pratique.
Après, certaines femmes peuvent ressentir leur ovulation, avec une gêne voire une douleur dans le bas ventre, leur signalant ainsi la période de fertilité.
Comment ne pas se tromper pour calculer son cycle menstruel ?
On peut se tromper !
Soit on a des cycles réguliers, c’est alors facile de le calculer.
Soit le cycle menstruel est irrégulier et cela est moins simple.
Des applications peuvent aider à calculer son cycle. Certaines calculent automatiquement un cycle régulier de 28 jours, d’autres font une moyenne des cycles précédents pour prédire le cycle menstruel à venir.
Lire également : 16 questions sur le cycle menstruel et les règles avec le médecin gynécologue Solenne Gricourt
Comment tomber enceinte en cas de cycles irréguliers ?
Bonne question.
Quand le cycle est irrégulier, le mieux est d’avoir des rapports sexuels réguliers, sans essayer de cibler la période d’ovulation, puisqu’elle n’est pas prévisible
Les spermatozoïdes sont résistants. Ils vivent 4 jours dans le tractus génital féminin. Même si on n’a pas un rapport le jour exact de l’ovulation, la fécondation est possible.
Il faut avoir confiance en la nature, la grossesse va arriver. Si elle n’arrive pas, il vaut mieux consulter son médecin.
Quand faut-il arrêter la contraception pour tomber enceinte ?
J’ai envie de dire quand on veut ! Quand on a un désir de grossesse, en fait.
On peut prévoir un bilan pré-conceptionnel avec son médecin gynécologue pour s’assurer qu’il n’y a pas d’anomalie majeure. Mais si la grossesse arrive avant cela, pas de panique.
Ensuite, on arrête la contraception et on débute une supplémentation en acide folique, présents dans la plupart des compléments pour femme enceinte, disponibles en pharmacie. Il est possible de se le faire prescrire par son gynéco lors de la consultation pré-conceptionnelle dont on parlait tout à l’heure.
En tant que médecin spécialiste en PMA, je veux souligner le fait de ne pas tarder à lancer le projet de grossesse. Depuis plusieurs années, l’âge moyen de désir d’enfant recule. Or, les difficultés viennent avec l’âge qui avance.
Malheureusement, on peut se retrouver face à des difficultés dont l’âge vient compliquer les possibilités d’aide médicale.
À la trentaine, si les conditions de vie, de couple sont propices à l’accueil d’un enfant, il faut se lancer.
Je ne recommande donc pas d’attendre particulièrement un délai après l’arrêt de la contraception (pilule, stérilet, autre…).
La pilule contraceptive peut-elle causer l’infertilité ?
Heureusement que non !
Sinon, depuis l’arrivée de la pilule, les médecins seraient malheureux et ne la prescriraient plus.
On prend un comprimé de pilule contraceptive par jour, ce qui signifie bien que le comprimé de pilule agit pendant 24h et pas plus.
Dans de rares situations, il peut arriver que l’hypophyse ait des difficultés à se remettre en route quand on a pris la pilule durant une longue période. Les échanges entre l’hypophyse et les ovaires peuvent alors mettre un temps à se relancer. Les premières règles après l’arrêt de la pilule tardent alors à arriver.
Sinon, si les règles arrivent, c’est que tout fonctionne.
Dernier cas possible, les femmes qui ont tendance à oublier qu’elles avaient des cycles irréguliers avant de débuter leur pilule.
Cela remonte en général à l’adolescence. Il faut savoir que la prise de pilule crée un cycle menstruel régulier. Quand ces femmes arrêtent leur contraception, elles retrouvent leurs cycles naturels. Et s’ils étaient irréguliers, et bien ils le seront de nouveau.
Une période d’abstinence sexuelle augmente-t-elle les chances de grossesse ?
Non, c’est même plutôt l’inverse.
Dans un éjaculat, on retrouve un nombre propice de spermatozoïdes compétents. À l’inverse, un délai d’abstinence long peut augmenter le nombre de spermatozoïdes morts dans l’éjaculat.
Alors quand on a un désir de grossesse et que tout va bien, je ne vois aucun intérêt à réaliser une période d’abstinence.
Encore une fois, j’insiste surtout sur la régularité des rapports. C’est la meilleure technique pour obtenir une grossesse.
J’ajoute que la seule abstinence qu’il doit y avoir concerne les toxiques, notamment le tabac.
Est-il vraiment impossible de tomber enceinte pendant les règles ?
Normalement non. Pendant les règles, c’est l’évacuation du tissu de l’endomètre, à l’intérieur de l’utérus qui attendait un embryon, qui ne s’est pas niché.
Cependant, deux bémols :
- Est-on bien sûr qu’il s’agit de ses règles ? Il peut justement arriver qu’on ait des saignements au moment de l’ovulation, donc au moment où la femme est la plus fertile. On est alors dans l’erreur.
- Autre situation piège: Les femmes qui ont des règles abondantes et qui durent dans le temps. Les règles se terminent alors que le cycle suivant est engagé. On peut avoir des saignements et être sur le moment d’ovulation du cycle suivant.
Ma recommandation : quand on ne veut pas de grossesse, il faut utiliser un moyen de contraception : pilule contraceptive, patch, stérilet, préservatif… Bref les méthodes sont multiples en 2021. Toutes les techniques qui consistent à parier sur l’évitement de sa période ovulatoire sont plus aléatoires.
En cas de FIV, faut-il se préoccuper de son cycle de règles ?
Oui et non. Initialement, le médecin a besoin de connaître la date des règles pour organiser son traitement de stimulation.
Souvent un pré-traitement va permettre de démarrer le cycle quand on l’aura décidé. Ensuite le cycle est complètement sous le contrôle des traitements. Alors les règles peuvent être décalées.
Sur un cycle de stimulation, elles arrivent 14 jours après le geste de l’insémination ou 14 jours après la ponction d’ovocyte dans le cadre d’une fécondation in-vitro FIV.
Mais ça, c’est quand il n’y a pas de grossesse. Si la femme est enceinte, les règles n’arrivent pas et on est tous ravis.
Qu’en est-il des règles pendant une période de stimulation ovarienne ?
Comme je disais précédemment, les règles sont importantes pour démarrer la stimulation.
Souvent on vérifie que ces saignements soient bien des règles, avec une prise de sang et ou une échographie. Le premier jour des règles est le premier jour du cycle.
Tout est ensuite sous contrôle des traitements et les règles suivantes arrivent 14 jours après. Cela signifie que la femme est enceinte.
Peut-on envisager une PMA alors qu’on a des cycles irréguliers ?
Oui, bien sur.
Des règles irrégulières signifient ovulation irrégulière.
La première réponse à cela est d’inciter à avoir des rapports réguliers. Je me répète mais… c’est crucial.
Ainsi on augmente les chances d’avoir un rapport pendant sa période d’ovulation. On s’expose à la grossesse durant son cycle et la grossesse arrive spontanément !
Ensuite, pas de panique, différents traitements peuvent aider à restaurer l’ovulation normale. Mais la, c’est l’affaire du gynécologue spécialisé en AMP.
À quel moment faut-il consulter pour lancer une PMA ?
C’est hyper important. Il faut que cela soit connu du plus grand nombre, par les femmes et des gens de manière générale.
Le désir d’enfant arrive de plus en plus tardivement. À cela s’ajoutent d’autres raisons: environnementales, sociétales, le désir de maîtriser de plus en plus le moment de la grossesse. Bref, L’infertilité grandit de plus en plus en France.
On définit l’infertilité par une année de tentative de grossesse infructueuse. Ce délai est réduit à 6-9 mois quand la femme est agée de plus de 35 ans.
Pour une femme qui n’a pas de règles, (donc pas de cycle), ou très peu (moins 4 fois par an), je lui conseille de consulter sans attendre ces délais. On pourra lui proposer de l’aider à restaurer son ovulation. Mais sans ovulation, pas de grossesse!
Un mot pour conclure sur le cycle des règles et la fertilité ?
Il faut aussi savoir que l’espèce humaine possède environ 25% de chances de grossesse par cycle, ce qui n’est pas très élevé. C’est pourquoi, il ne faut pas s’inquiéter si on n’est pas enceinte sur les premiers cycles.
La régularité des cycles signale une ovulation régulière, tous les mois. Après, l’irrégularité du cycle menstruel n’est pas synonyme d’infertilité.
Ma recommandation est d’avoir des rapports réguliers. Mais là, je crois que vous aviez compris!
Pour maximiser ses chances, une vie saine (enlever les toxiques, le stress, avoir une activité physique…) ne peut que faire du bien.
Enfin, si la grossesse n’arrive pas, il faut consulter un gynécologue spécialisé en AMP dans les délais que l’on s’est dit.
Nous remercions Claire Gauché-Cazalis pour son temps et les échanges.
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