Baisse de libido et contraception : qu’en dit la Science ?

Manque d’envie, culpabilité, tristesse, les sentiments liés à la perte de la libido sont multiples et sont souvent difficile à vivre. La cause est encore inconnue dans la majorité des cas alors que de plus en plus de femmes soupçonnent leur pilule contraceptive.

En mars 2019, une étude de Sexual Medicine a révélé que les rapports sexuels ont un impact important sur notre bien-être quotidien. Importants à tout âge, ils permettent de sécréter l’endorphine, la fameuse hormone du bonheur. Parmi les facteurs responsables de la perte de la libido, on retrouve la fatigue, la charge mentale mais surtout la prise de la pilule contraceptive. Alors, quel est le grand fléau de notre libido ?

Pour éclaircir ce mystère, nous nous sommes tournés vers deux spécialistes : Marie-France Philippe, Endocrinologue et sexologue à la clinique de la sexualité à l’hôpital de Charleroi, et Sheila Warembourg, sexologue et créatrice du programme international Sexual Understanding.

Une baisse de libido à plusieurs facteurs

Nous avons demandé à Marie-France Philippe si elle avait déjà eu des patientes se plaignant d’une baisse de libido liée à leur pilule.

Oui, dans le service de sexologie-endocrinologie, la baisse de libido liée à la prise de la pilule contraceptive est la première plainte. Ce n’est pas toujours évident de prouver le lien avec la pilule. Ce n’est pas quelque chose de systématique, la majorité des femmes ne vont pas oser se plaindre de baisse de libido.

baisse de libido, ennui sexuel
N’hésitez pas à parler de votre ressentie à votre professionnel de santé.

Dans les cas de baisse de libido, on va faire un bilan sanguin et hormonal. Dans la majorité des cas, qu’elles soient ou non sous pilule, il y a un problème de fatigue, de dépression, ou un manque de bien-être, de Self Love. Est-ce que ces femmes n’ont pas le morale parce qu’elle n’ont pas de libido ? Ou, est-ce que le manque de de libido engendre cette baisse de moral ? C’est ce que nous essayons de savoir. Dans le bilan sanguin, on va voir s’il n’y a pas d’hyperthyroïdie ou de manque de vitamine : il n’est pas toujours question du facteur contraception. Finalement, il y a différentes causes et c’est ce qui rend le compte-rendu complexe.

Il faut savoir qu’il y a beaucoup de pilules à base d’anti-endogènes, c’est ce qui va résoudre les problèmes de perte de cheveux ou d’acné. En associant l’androcure, cela va contrer les hormones masculines qui sont pourtant, à l’origine de la sensation de désir. Diane 35 par exemple, est un pilule contraceptive de moins en moins prescrite pour cette raison.

Le premier organe sexuel, c’est le cerveau

Pour Marie-France Philippe, il faut prendre en compte aussi bien les facteurs psychologiques que physiques. Pour poser le diagnostic, on place la baisse de libido en contexte, on constate qu’on a moins envie mais la question est Pourquoi ? A-t-elle déjà eu un orgasme ? Si la patiente n’en a jamais eu, c’est normal qu’elle n’en ai pas envie. 

Prenons l’exemple des spaghettis à la bolognaise. Si vous n’avez jamais pris un plaisir particulier à manger les pâtes à la bolognaises, ce n’est pas un plat dont vous allez raffoler. Par conséquent, il est normal que vous n’en n’aillez pas nécessairement envie : vous pourrez faire sans. Le sexe c’est pareil, s’il n’est pas associé au plaisir, vous n’en aurez pas envie.

Moi, je pense que c’est un sujet tabou, surtout avec les réseaux sociaux. On a l’impression que les gens ne montrent que leur bonheur, ce qui amènent les femmes à mener plusieurs vies en même temps : être une mère, une carriériste, une amante, une bonne épouse et avoir du succès dans sa vie de couple.

C’est très difficile d’assumer tout ça et cela mène rapidement à la fatigue, au surmenage. Maintenant qu’on parle de plus en plus du bien être de la femme, il y a des études qui mettent en évidence que la sexualité est importante et participe à notre bien être. “

Baisse de Libido : oser s’exprimer

Alors charge mentale ou pilule contraceptive inadaptée ? Nous avons demandé à Sheila Warembourg de nous donner quelques conseils pour se libérer de ce tabou et oser franchir le pas : tout le monde a le droit à une vie sexuelle épanouie.

Jouets sexuels pour relancer sa libido
Vous pouvez utiliser des sex-toys peut aider à relancer votre libido.

“Je ne suis pas médecin ni biologiste. Oui, la charge mentale et physique joue sur le libido, comme peuvent jouer le manque d’intérêt pour son partenaire actuel, le stress du travail ou tout autre stress, le manque de confiance dans sa capacité de séduire suite à un transformation corporelle telles la grossesse, la prise ou perte de poids. Cependant, il me semble que les hormones qui régulent les contraceptifs peuvent avoir un impact sur la libido, la prise de poids, les boutons d’acné, l’augmentation ou la perte de la taille de la poitrine, etc. Ce n’est pas l’un ou l’autre, mais peut être l’un et l’autre. Peu importe, si la femme a l’impression que c’est son contraceptif, il faut l’écouter !

Il faut insister auprès de son professionnel de santé. Je conseille des sage-femmes pour un suivi gynécologique. Elles sont plus disponibles, plus accessibles et donnent de très bons conseils.

Oui, les participants en parlent souvent. En revanche, les femmes en situation de handicap n’en parlent jamais, elles n’ont certainement pas assez d’informations sur leur contraception ni leur corps pour en avoir l’idée, notamment en cas de déficience intellectuelle.”

Mettre fin aux tabous

Même si nous sommes en 2022, les non-dits sur la sexualité ont la vie dure. Comme nous l’a indiqué Sheila Warembourg, l’important c’est d’en parler. Oser s’exprimer est un premier pas important sur cette route sinueuse de la libido :

“Pour une femme, oser dire qu’on apprécie des relations sexuelles, dans notre société, comme dans la plupart des sociétés d’ailleurs, n’est pas socialement bien vu. Il faut en parler, lancer la discussion. Dans mes formations Accompagner la vie intime, affective et la sexualité des personnes en situation de handicap et lors des groupes de parole destinées aux personnes en situation de handicap, c’est ce que je constate. Quand on ouvre la discussion, les gens sont surpris de voir que c’est possible de parler du corps, de son fonctionnement, de plaisir et de déplaisir au fil de la vie, traiter le sujet, sans raconter ce qu’on a fait ou pas fait au lit hier avec son-sa partenaire !

Quand ils m’entendent parler en utilisant des mots justes, explicites et sans vulgarité, ils voient que c’est possible d’en parler. Les moins de 30 ans vont certainement avoir plus de facilité à en parler car les médias ouvrent la discussion. On va certainement constater une différence générationnelle. En tous les cas, je l’espère !

Les conseils de Sheila

En effet, la baisse de libido cela peut arriver à tout le monde. Alors, en attendant de savoir si la pilule est responsable, ou pas, de cette variation de désir, il existe heureusement de multiples façons de relancer sa vie sexuelle :

“Vous avez déjà reconnu que votre libido est importante ! C’est un grand pas. Maintenant, il faut chercher en soi pour savoir ce qui crée la difficulté. Puis, comment faire pour y remédier. Parfois, et peu importe la raison de fond, on a juste besoin de s’y remettre ! Quand on perd l’habitude de jouer avec son-sa partenaire, créer des moments de plaisir ensemble, ou avoir des relations sexuelles : créer des conditions, sans attendre la spontanéité, « faire exprès ».

Orgasme pendant la relance de sa libido
La baisse de libido n’est pas nécessairement quelque chose de définitif.

Quand on n’a pas de partenaire, se mettre en condition pour « se faire l’amour », créer une ambiance pour se sentir bien avec soi-même comme un bain, des bougies, du parfum et éventuellement se servir de sex-toys. Plus on s’entraîne, plus on est en forme !

 

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